Pourquoi est-elle née fille?
Elaïa est née au mois de Juin, dans une famille rigide et autoritaire. Sa mère la mit au monde difficilement, et les médecins déconseillèrent une nouvelle grossesse, pour la survie de la parturiente. Acceptant de mauvaise grâce cette fille non voulue, ils l'éduquèrent avec sévérité, ne tolérant d'elle ni écart d'aucune sorte, ni babillage inutile. Elle apprit à craindre les accès de violences du Père, prompt à la corriger tant physiquement que moralement mais aussi la langue de vipère de sa mère qui encourageait cela, caftant les bêtises faites par l'enfant durant les absences du paternel, qui la sanctionnait alors à son retour. Et peu importe si les dires de son épouse étaient fondés ou simples commérages de sa part. L'enfant dans tous les cas devait bien être dans l'erreur...

Elle apprit donc à se taire, à agir avec rigueur et vivacité, pour ne pas attirer les foudres de ses géniteurs. Et si en ses jeunes classes, elle était solitaire et isolée, le fait que ses institutrices en tirent de mauvaises conclusions et ne lui attirent quelques roustes en mettant des mots d'alertes aux parents d'Elaïa,  la demoiselle de son côté s'assura par la suite de se mêler à ses camarades, à ne pas attirer l'attention, en se fondant dans le moule de la bonne élève bien intégrée. Personne ne soupçonna alors quoi que ce soit. Et si elle avait des manches longues même en temps de grandes chaleurs il lui suffisait de dire que son teint trop pâle et sa peau trop fragile feraient une mauvaise réaction au soleil pouvant causer maladies cutanées et cancers vicieux. Ce n'étais pas un mensonge, et ces arguments furent de bonnes explications qui tuèrent toute velléité d'enquêtes plus approfondies. La petite aurait voulu clamer haut et fort ce qu'il en était. Mais sa crainte était telle qu'elle préférait ces explications enfantines. Le silence pour se préserver.

S'assurant de récolter de bonnes notes et de bonnes appréciations de ses enseignants, la jeune fille se développa sous la coupe de ses parents, mais s'épanouissant tout de même. Le collège fut une période sans trop de heurt, elle demeurait plus silencieuse que les autres, certains commencèrent à tenter de lui attirer des noises, mais elle s'en départie sans trop de peine. Ce n'est qu'un peu plus tard dans l'adolescence que la situation se dégrada réellement... A son grand malheur.

Innocence bafouée, chairs martyrisées
L'arrivée au Lycée marqua un tournant dans sa vie. Prétextant une structure trop éloignée de son domicile, la belle réussie à être acceptée en collocation durant ses deux dernières années, alors qu'elle planchait sur le Bac. Se défaire ainsi de l'emprise familiale a été un réel soulagement pour la jeune femme qui prit soin de leur envoyer régulièrement ses notes, ses bulletins scolaires, qu'ils continuent à veiller ainsi de loin sur sa réussite.

Pourtant, le répit fut de courte durée quand des jeunes hommes de son établissement la prirent en grippe. D'abord des tirades douteuses, des œillades déplacées. Puis des bousculades, un casier fracturé et saccagé, des rumeurs se propageant...

Deux ou trois crétins de sa classes la prirent à part, une fois, l'insultant, venant au contact. Elle tenta de s'en défaire mais en vain. Elle se débattit, les blessa en retour de ce qu'ils faisaient. Tentant de crier pour alerter n'importe qui, un autre élève, un enseignant... Quelqu'un... Personne ne vint. Si on l'entendit faire du vacarme en se défendant, personne ne fit mine d'avoir entendu quoi que ce soit. Alors quand ils la laissèrent, chemisier défait, blessée et choquée dans une salle déserte.. Elle ne resta pas là. C'est silencieuse et rasant les murs tant qu'elle pouvait qu'elle rentra chez elle tant bien que mal, se fichant alors que pour cela elle n'aille pas suivre le reste de ses cours de ce jour là. C'est avec une sorte d'état second, mécanique qu'elle jeta à la poubelle ses vêtements souillés de son sang et d'autres choses avant  de rejoindre sa douche tenter de laver cette horreur vécue sous un jet d'eau froide, puissant. Mais y rester un long moment ne suffit pas à retirer cette impression de salissure, d'humiliation.  Rien n'y ferait.

Elle passa le reste du jour et la nuit suivante prostrée dans son lit, réfléchissant, tentant de se reprendre. Pour enfin se relever, s'apprêter pour le lycée, naturelle, un brin austère dans son choix d'atours. Rien ne pouvait laisser soupçonner ce qu'il s'était passé, et quand sa colocataire lui demanda si ça allait, elle ne vit pas que le sourire rassurant était forcé. L'art de bien paraître, de ne pas attirer l'attention était une seconde nature pour la demoiselle outragée.

Personne ne viendrait. Personne n'était venu. A quoi bon parler. A quoi bon porter plainte. Personne ne la croirait. Ce serait elle la fautive. Fautive de les avoir provoquer, sans doute. De les avoir allumer puis de ne pas assumer... C'est ce qu'ils diraient. Ce que ces salopards avaient argués en la laissant une fois leur affaire terminée... Personne ne croirait ses paroles...


Apprendre à faire de ces traumatismes une force.
Alors le silence devint rempart. Ses atours plus sobres et classiques devinrent armures. La distance et la froideur pour arme. Elle s'enferma en elle même, méfiante comme jamais. Elle devrait se débrouiller seule. Ils ne la feront pas quitter les cours. Elle n'abandonnerait pas. Pas à cause d'eux.

Si elle a été bafouée, elle sû s'en relever. Il le fallait bien. Elle apprit à décrypter les regards des hommes coulant sur sa peau. Leurs paroles, leurs gestes. Elle tâcha de s'en préserver avec plus ou moins de succès.  Elle ignorait qu'après ses études... Viendrait l'enfer. Ou presque.

Survivre quand on voudrait lâcher prise.
Elle venait de décrocher son Bac quand elle disparue sans laisser de nouvelles. Si ses parents la recherchèrent, elle n'en su rien. Un soir, alors qu'elle rentrait chez elle... Une voiture l'accosta et avant qu'elle n'ait pu comprendre la situation, se retrouva captive.

Enlevée pour sa beauté. Enlevée par la volonté d'un homme qui avait été séduit par son regard d'azur. Tout s'achetait, après tout. Tout, même les individus. Trafic d'humains... Quand on savait quoi chercher et où.. L'on trouvait bien des horreurs commises et impunies...

De Londres, elle se retrouva à Amsterdam, Le voyage se fit par voie des mers... Si près.. Elle échoua ainsi dans un Quartier bien connu, nommé le Quartier Rouge, réputé pour son activité du sexe où là bas c'est à la vue de tous, en général sous de bonnes conditions.... Mais pas pour elle. La jeune femme intégra ainsi un réseau plus sombre, plus néfaste, apprenant par la force des choses l'un des plus vieux métiers du monde. Son sens de l'observation et sa proportion à l'obéissance, à l'anticipation lui permirent de trouver les mécanismes attendus. Obéir en silence, prompt et adroite... Elle su s'y faire sa place, serviable et dévouée. Elle faisait le nécessaire pour demeurer en vie. Tout simplement.

Mais elle en vit d'autres plus réfractaires, se débattant, tentant de fuir. Se plaignant sans cesse... Elle en vit les représailles. N'en conçue qu'une volonté plus âpre à rester dans le rang. Rien ne valait ça. Le prix à payer pour de telles velléités était bien trop élevé.

Captive du Scorpion.
Durant l'une de ses réservations, elle fit une rencontre qui allait changer bien des choses.  Un beau jeune homme au regard magnétique la choisie elle pour l'accompagner durant une soirée mondaine, et si la belle, peu sûre d'être à la hauteur de ce que l'on peut attendre d'une escort girl hésita d'abord... Elle accepta le contrat qu'il lui proposa à la suite de cet engagement qui servit de test.. Décision qu'elle ne regretta pas. Elle apprit ainsi à découvrir autre chose, le service d'un particulier, assouvir les besoins d'un seul, et non enchaîner les passes sans s'arrêter... La qualité plutôt que la quantité. Et Lui... Fut un excellent Mentor. Il avait quelque chose qui incitait la belle à lui faire toute confiance. Il l'initia à d'autres plaisirs, à d'autres compétences. A s'abandonner à ces jeux, ces règles, à  Ses mains, surtout. Lavant ainsi des années de répressions, de battues. Lavant les humiliations subies auparavant. Elle en sortie plus forte. Apprenant le plaisir sous la douleur consentie, ou simplement la satisfaction d'avoir honorer ses attentes. Elle se fit amante, compagne, partenaire. Ses facettes devinrent multiples. Elle apprit bien des choses... Et Lui fut le seul à la pousser ainsi toujours plus loin, aussi aveuglément.

Elle se le représentait comme un Scorpion, beau, dangereux. Mortel. Il connaissait bien ces créatures, en possédait dans des terrariums aménagés. Elle n'a jamais posé la question sur de telles connaissances, mais savait qu'il la subjuguait à bien des égards sans grand mal.... Elle servait un homme charismatique et peu porté sur le pardon, elle en avait pleinement conscience.

Les Marques restèrent identiques et brouillons sur leurs dermes respectifs. Mais elle ne pouvait nier cette étrange attraction le liant si profondément à cet homme qui la sortit du réseau pour la faire totalement sienne. Plus vraiment captive, mais plutôt employée, élève. Pendant des années, elle le servit sans faux pas. Avec loyauté et dévouement... Jusqu'à sa chute.

Une rivale. Jalouse et possessive voyant d'un mauvais oeil l'ardeur de la brune à accomplir les volontés du Scorpion. Cette garce mit du temps, mais une fois son piège au point, Elaïa tomba dedans sans rien voir.... Et la chute fut rude. Très rude. Elle en conçu une rancoeur extraordinaire envers cette jalouse... Si elle devait la revoir, elle le paierait, c'était certain. Mais en attendant...

Déchéance et case départ...
Il devait s'éloigner pour voyage d'affaire. Absent pendant quelques semaines, elle ne serait pas contactée de sitôt, mais avait des choses à faire en Son absence, tout comme l'Autre.... Mais si elle s'y appliqua... La seconde eut tôt fait de mettre sa machination en place... Un piège des plus rôdé dont la brune ne soupçonna rien... Des infos à la télé.. Un accident sur la trajectoire, leur Employeur disparu... Et cette langue de vipère menaçante, attaquant .....

Ce fut trop pour Elaïa qui prise de frayeur terrible décampa. Quittant tout, logement, emploi... Elle partit loin, se cacher, faire profil bas... La voilà partie pour se planquer sur Paris, dans un hôtel....Elle voulait reprendre son souffle, se perdre dans la ville et ses méandres...  Mais un coup de sonnette à sa porte changea tout... En ouvrant.. Lui, furieux. Pourquoi s'être enfuie? N'avait-il pas été clair?..

Comment l'avait-il retrouver? Et si vite?

Elle comprit alors. Trop tard pour y remédier... Et cet homme à qui elle avait tout donné... La déchue de sa position. Plus de service à Ses côtés. Plus de confiance. Ce qu'il lui avait offert en regard de ses aptitudes... Il le reprit. Parjure.... Il n'avait jamais été violent. Jusqu'à ce jour.

Et elle encaissa. Acceptant cette ire. Acceptant la sanction. Plus rien. Elle n'était plus rien et l'Autre avait gagné et devait s'en réjouir..... Il lui annonça avoir prit des dispositions. Et quand elle tomba inconsciente... Elle se réveilla dans un endroit des plus familiers.... L'Enfer de ses débuts...Amsterdam.... Comment l'avait-il conduite ici? Aucune idée. Mais il l'avait raccompagnée, la fuyarde... Et abandonnée à son sort... Alors recommencèrent les passes et les coups bas. Pendant un temps, peut être un an, avant qu'un infiltré ne remonte la filière et ne fasse démanteler le réseau de l'intérieur. Sauve.

Pour un temps.

Elle profita de l'évacuation pour décamper sans demander son reste. Anonyme. Solitaire... Elle prit la fuite en changeant à nouveau ses atours, en se teignant les cheveux, les coupant... Se fondre dans la masse et partir de là. Elle quitta le Quartier Rouge pour les pays du Froid, aussi loin que possible de ses repères habituels. Là où on ne la chercherait pas. Elle devait survivre. Coûte que coûte. Et ne surtout pas être retrouvée...

Liberté nouvelle... Et rechute volontaire.
Elle échoua ainsi à Montréal au Canada, une belle et grande ville, aux moeurs diversifiées, à la population nombreuse. Forte de ses talents, voulant se refaire un nom, elle obtint des papiers comme étant Elaïa Pellerin, naturalisée Canadienne. Couper les ponts de son passé, être enfin libre... Des contacts trouvés sur place l'aidèrent à ainsi assurer sa survie... Et elle ouvrit légalement un salon de massage.. Tantrique. Cela se rapprochait de son ancienne vie, mais en lui assurant la sécurité d'un emploi clean et stable. Venaient à elle des personnes souhaitant éveiller leurs sens par les massages sensuels et langoureux, techniques et précis qu'elle prodiguait avec soin et professionalisme. Particuliers, traumatisés voulant renouer avec leurs sensations, leurs émotions... Elle se fit complémentaire aux médecines douces, élargissant peu à peu ses contacts... Et l'on commença à entendre parler de l'hirondelle ....

En avril, elle fit la rencontre d'une jeune demoiselle. Un peu paumée, avec un quelque chose de dangereux, Elaïa le sentait d'instinct. Elle voyait en elle comme un reflet de ce qu'elle avait été si longtemps auparavant... Et voulu l'aider au mieux, voulant comprendre ce qu'elle ressentait, ce qu'elle vivait. Ne pouvant être aveugle à ses tourments qu'elle comprenait pour en avoir vécus de similaires. Mais n'y parvint qu'un temps. Elle ne pu la sauver, finalement.

Pour ce qui est de ses penchants, de ses nouvelles espérances .. Elle résista... Quelques mois. De longues semaines à se tenir sur la bonne pente... Jusqu'à ce que la connivence avec certains clients ne la rende audacieuse, et doucement, au fil des rencontres.. Qu'elle ne recommence. A proposer plus qu'un massage. Plus que des préliminaires, mais un vrai moment de plaisir et de sens assouvis. Des services charnels, dans la discrétion d'alcôves et de chambres à l'étage que la brune fit aménager au fur et à mesure, sans attirer aucunement l'attention... Un moment de secret, de confidences. De plaisir partagé.

Et cela commença à faire du bruit... Qu'elle prenne garde, l'hirondelle, à ne pas se retrouver dans le pétrin à nouveau... Elle est heureuse de cette vie.. Sans pouvoir délaisser ses craintes, évidemment.. Mais elle est bien.

Que peut bien lui réserver l'avenir?