De vastes étendues herbeuses entourées de bois ne laissant filtrer la moindre présence humaine. Une île cernée par les eaux qui forment un rempart naturel contre les importuns qui voudraient s'y introduire... Oui, cet endroit est magnifique et je ne cesse de porter un regard admiratif sur les couleurs qui valent tellement plus que celles que je porte.
- Spoiler:
J'inspire à pleins poumons par la fenêtre que j'ai ouverte en grand, me penchant sans crainte pour ma sécurité malgré les demandes répétées du chauffeur pour que je me rassois sur mon siège passager.
- Oh mais il fait si beau dehors ! Ce serait dommage de ne pas en profiter !
Une main tire doucement mais fermement sur un pan de ma robe et je rentre dans l'habitacle, tournant un regard froissé et une mine boudeuse vers le conducteur du taxi.
- Vous aurez tout le temps d'en profiter quand vous serez arrivée, et puis il fait pas si beau que ça, le ciel est gris et ils annoncent de la pluie dans la soirée.
- Erreur, il y a du bleu là, regardez !
Je pointe du doigt un minuscule coin de ciel bleu qui tend à disparaître très prochainement et le chauffeur éclate de rire. Ça lui va nettement mieux, vous ne trouvez pas ? Il m'est tout de suite beaucoup plus sympathique.
- Vous êtes du genre optimiste vous ! C'est bien, il faut l'être de nos jours, les jeunes font tous la tête et ne sont jamais contents de rien.
Je souris, ravie qu'il me croit encore aussi jeune que ce qu'il semble penser. Je m'approche plus de la sortie de la vingtaine que de son début mais je n'ai jamais fait mon âge -merci papa maman- aussi je me contente de lui adresser mon plus beau sourire de coquette, demeurant sagement assise jusqu'à-ce qu'on arrive à l'entrée d'une zone herbeuse entourée de clôture et dont l'entrée est accompagnée d'un grand panneau annonçant le nom de l'endroit.
- Vous êtes arrivée princesse !
Me fait mon aimable chauffeur à qui je paye son dû par carte de crédit, le sourire amusé aux lèvres.
- Je ne suis pas une princesse, je suis une magicienne, mais merci du compliment, vous avez été de très bonne compagnie. Je peux vous rappeler pour le retour comme prévu ?
- Oui bien sûr, vous n'aurez qu'à me prévenir une heure à l'avance et je viendrais vous chercher ici-même. Amusez-vous bien.
Je sors en remontant mon sac à main géant sur mon épaule, ajustant de ma main libre les rubans de ma robe avec lesquels le vent semble vouloir jouer, tout comme avec mes cheveux remontés exprès en chignon et laissés sans aucune perruque pour les empêcher de respirer. D'ailleurs en parlant de ça, j'inspire à pleins poumons l'odeur qui me rappelle celle de la ferme, mélange de paille, de crottin, d'herbe fraîche et de terre batture, avant de m'avancer d'un pas presque sautillant tant je peine à contenir ma joie.
- Bonjouuuuuuur !
Que je lance à la cantonade dans l'espoir que quelqu'un m'entende et vienne m'accueillir pour me guider dans cet immense endroit.
- Je suis Mademoiselle Saitou, j'ai appelé ce matin pour venir vous rendre visite.
Et j'ai même quelques minutes d'avance, si ça ce n'est pas beau, franchement. Je regarde autour de moi avec une vive attention, appréciant ce qui m'entoure. On pourrait croire à me voir que je ne suis qu'une femme de la ville qui aime avoir une toilette impeccable -bon, ça reste vrai aussi- mais je suis aussi, comme disait ma mère, une "petite chipie qui ne tient jamais en place" et qui a toujours aimé crapahuter un peu partout lorsque l'occasion m'en était donnée. Jouer les poupées et la magicienne, j'adore, mais lorsque je suis en Grocha, je préfère largement aller courir par monts et par vaux pour découvrir mon monde. Celui de cette île avec les chevaux que j'entends hennir non loin de là me donne envie d'aller l'explorer sans attendre !
@Conaid Jarvinen