*Mais qu'est-ce qui m'a pris bon Dieu !*
Constance se sentit rougir jusqu'à la racine des cheveux. Certes, elle ne faisait que répondre à la confidence de Frank, il n'empêche. Elle n'avait pas réfléchi, c'était sorti tout seul. Et en quelques instants, elle qui était si assurée, ne l'est plus du tout.
*Et maintenant on fait quoi ?*
Ne pas paniquer, ne surtout pas paniquer. Il lui suffisait de continuer à danser et de se concentrer sur le rythme. 1,2,3,1,2,3. Tout irait bien. Ce n'était pas grave, ils avaient juste une même impression, un même trouble. Rien de méchant. Une fois qu'ils auraient fini de danser, elle lui proposerait d'aller se goinfrer au buffet. Ils riraient sans doute de leur trouble mutuel et puis voilà. Affaire classée.
*1,2,3.1,2,3*
En plus, Frank lui faisait confiance. Il le lui avait dit. Et cela ne rendait en rien les choses plus faciles. S'il lui faisait confiance, elle ne pouvait pas faire, ou dire n'importe quoi. Se concentrer, et continuer. Surtout ne rien laisser paraître de son tumulte intérieur. En plus, connaissant un peu Frank, est-ce qu'elle le troublait vraiment, au fond ? Avec sa manie de jouer avec la vérité, on n'était jamais très sûr. N'empêche, il avait l'air plutôt sincère. Et en fait, il ne lui avait jamais menti.
*1,2,3. 1,2... quoi ?*
Elle se concentrait avec application sur ses pieds, quand elle senti la main de son cavalier se poser sur sa joue. Et ça, ce n'était pas du tout, mais alors pas prévu au programme. Pas grave, elle pouvait gérer. Il suffisait de lever les yeux vers lui ; tout en gardant le compte des pas. Elle pouvait très bien y arriver. Ce n'était pas l'essaim de papillons qui s'agitait dans son ventre qui allait la perturber. Il suffisait qu'elle continue de compter.
*1,2,3,1..2..1...2... 5 ? Mais qu'est-ce qui vient après 2 déjà ?*
Elle s'empêtrait dans ses comptes et les grands yeux de Frank plongés dans les siens n'étaient d'aucune aide. Oui, il avait deux yeux, ça faisait mnémotechnique, mais Constance avait complètement oublié le chiffre qui venait après 2. Constance ne savait de toute façon plus compter à cet instant précis. Elle aurait même été incapable de tenir le compte des battements effrénés de son cœur. Il battait si fort qu'elle avait l'impression de Frank pouvait l'entendre. Il était si près. Et son visage s'approchait de plus en plus.
Que faire ?
1
Elle fit glisser la main posée sur son épaule derrière sa nuque. Pour ne pas tomber, évidemment. Elle sentait ses genoux flageoler légèrement. Ce devait être le manque de sucre. Ou la chaleur, il faisait vraiment chaud dans cette salle, non ?
2
Elle se hissa doucement sur la pointe de pieds. Par politesse bien sûr. Puisqu'il se baissait vers elle, il fallait bien qu'elle s'élève pour aller à sa rencontre, non ? Il eut été injuste de le laisser seul à faire un effort.
3
Elle ferma les yeux. Et posa doucement ses lèvres sur les siennes. Ou alors ce fut lui. Enfin, le résultat était le même.
Et il n'y eu tout d'un coup plus besoin de compter. Plus besoin de retourner au buffet, plus besoin d'aller ouvrir une fenêtre. Elle n'était plus nerveuse, elle n'avait plus trop chaud. C'est comme si tout d'un coup, tout s'était remis à sa place. Plus de désordre, plus de panique, tout était là ou il devait être. Eux, face à face, sa main sur sa joue, ses doigts sur sa nuque. Ses lèvres sur les siennes.